Les grandes nouveautés apportées en matière de nullités en droit des sociétés
L’ordonnance du 12 mars 2025 vient transformer en profondeur le régime des nullités en droit des sociétés. Cette réforme, qui entrera en vigueur le 1er octobre 2025, poursuit un double objectif : simplifier les règles et renforcer la sécurité juridique des sociétés.
L’une des innovations majeures réside dans l’introduction d’un mécanisme inédit, le « triple test », qui encadre désormais la possibilité d’annuler une décision sociale.
Pourquoi une réforme du droit des nullités ?
Jusqu’ici, le régime des nullités était jugé complexe, parfois source d’incertitudes et de contentieux multiples. Les sociétés pouvaient voir certaines de leurs décisions remises en cause pour des irrégularités de forme ou de procédure, même lorsque ces manquements n’avaient eu qu’un impact limité.
L’ordonnance vise donc à rationaliser les causes de nullité, à limiter les effets excessifs des annulations et à offrir une grille d’analyse plus équilibrée, tenant compte à la fois de la protection des associés et de l’intérêt social.
L’apport central : le « triple test »
Désormais, une décision sociale ne pourra être annulée que si trois conditions cumulatives sont réunies :
Un grief démontré : la personne qui conteste doit prouver que la règle violée protégeait un intérêt précis et que cet intérêt a effectivement été lésé.
Une influence sur la décision : l’irrégularité doit avoir pesé sur l’issue du vote ou le contenu de la décision adoptée. Les erreurs purement formelles ne suffisent plus.
Un équilibre avec l’intérêt social : le juge devra vérifier que l’annulation ne produit pas, pour la société, des effets disproportionnés par rapport à l’irrégularité constatée.
Ce triple filtre marque une véritable évolution de philosophie : il ne s’agit plus de sanctionner mécaniquement les manquements, mais d’apprécier leur impact réel sur la société et ses membres.
Autres apports notables de la réforme
Clarification des causes de nullité : seules les violations de règles impératives ou du droit commun des contrats peuvent désormais justifier une nullité. Les infractions aux statuts ne suffisent plus, sauf si la loi ou une clause statutaire le prévoit expressément.
Fin des nullités en cascade : la nomination irrégulière d’un organe ou de l’un de ses membres n’entraînera pas automatiquement l’annulation des décisions prises par la suite.
Réduction du délai d’action : l’action en nullité est désormais enfermée dans un délai de deux ans, contre trois auparavant.
Souplesse pour le juge : il pourra retarder les effets d’une annulation afin d’éviter des conséquences trop lourdes pour la société.
Quels impacts pour les sociétés ?
La réforme apporte une meilleure prévisibilité et limite les risques de remise en cause de décisions valablement adoptées sur le fond. Toutefois, elle renforce aussi la nécessité pour les dirigeants et associés de :
soigner la rédaction des statuts, s’ils souhaitent prévoir des sanctions en cas de non-respect,
documenter et justifier les décisions sociales importantes,
agir rapidement en cas de contestation, compte tenu du nouveau délai abrégé.
En conclusion
Avec l’ordonnance du 12 mars 2025, le droit des nullités en matière de sociétés se veut plus lisible, plus équilibré et mieux adapté à la vie des affaires.
L’entrée en vigueur au 1er octobre 2025 sera un tournant majeur pour la gouvernance des sociétés françaises : le triple test s’imposera comme la clé de voûte du nouveau régime, combinant simplification, sécurité juridique et protection de l’intérêt social.